L'Indigo, ces bleus qui fascinent.
L’Afrique possède un grand nombre de plantes indigofères, soit environ six cents cinquante espèces d’indigotiers, parmi lesquelles des variétés autochtones et sauvages.
Toutes les nuances de bleu peuvent être obtenues, du bleu presque noir, le noir est souvent de l’indigo très foncé, au bleu clair. Le bleu profond de l’indigo est en général préféré, même lorsqu’il est proche du noir, en particulier chez les populations sahéliennes.
La technique de tissage est la même que pour les textiles Kente, Baoule ou Bogolan.Le tissu, souvent du coton brut ou du basin blanc, est ainsi trempé plusieurs fois dans un bain de feuilles d’indigotiers puis fermenté avec un mélange infusé. Une étape qui va permettre la plus grande créativité. En fonction du nombre de rinçages, le bleu sera plus ou moins intense.
Pour les toiles aux motifs très variés, les dessins sont obtenus en pratiquant sur la pièce de tissu avant qu’elle ne soit teinte, des réserves qui arrêteront la progression de la teinture dans les fibres textiles. Ces réserves peuvent être faites au moyen de ligatures serrées, de coutures, par enduction de cire ou recours à un pochoir etc. Il est possible d’intervenir soit sur l’écheveau de fils avant tissage ou directement sur la pièce d’étoffe elle-même. Au sujet des motifs, il est possible donc de recourir à de la cire, (pratique identique mais plus ancienne avec de la pâte de riz ou de manioc), ou bien de nouer plusieurs pans du textile pour que la pigmentation ne gagne pas toute la toile, créant des déclinaisons à l’infini, dont l’iconographie est extrêmement riche. Il n’existe ainsi pas un pagne d’Indigo similaire, le bleu oscillant entre le quasi-translucide et le noir, pouvant même dans certains cas avoir un aspect brun. Une fois sèches, les chutes sont enfin frappées à l’aide de maillets en bois pour fixer les pigments de manière définitive.
Plangui, tritik et batik, trois dénominations en provenance d’Asie qui désignent des techniques de réserve. Par extension elles se sont appliquées à des procédés similaires que pratiquent d’autres régions du monde dont l’Afrique. Chacune d’elles présente une infinité de variantes selon la manipulation qui est faite du tissu. Ligatures ou coutures plus ou moins serrées, pliures régulières ou irrégulières, mélange des types de pli, froissage, torsion, tressage etc. Toutes ces techniques pouvant être mélangées.
Ce pigment rare qu’est l’indigo est au centre d’une vraie saga et touche tous les domaines des arts textiles tout au long de l’histoire jusqu’à sa diffusion extrême quand, à la fin du XIXe siècle, on découvre l’indigo de substitution obtenu chimiquement, mais nullement utilisé en Afrique de l’Ouest. L’indigo a été à l’origine concurrencé par la teinture bleue pastel qui est elle aussi d’origine végétale mais qui n’atteindra jamais la force colorée de l’indigo. Des voyageurs arabes attestent par leurs écrits des cultures d’indigotier en Afrique dès le XIIe siècle.
Au XVII siècle, l’Indigo naturel deviendra un incontournable en Europe, remplaçant la teinte bleue de guède ou pastel. Un succès qui lui vaudra le doux surnom « d’or bleu ».
Rédaction Sylvie Brignon